En ce temps-là,
du milieu de la foule, quelqu’un demanda à Jésus :
« Maître, dis à mon frère
de partager avec moi notre héritage. »
Jésus lui répondit :
« Homme, qui donc m’a établi
pour être votre juge ou l’arbitre de vos partages ? »
Puis, s’adressant à tous :
« Gardez-vous bien de toute avidité,
car la vie de quelqu’un,
même dans l’abondance,
ne dépend pas de ce qu’il possède. »
Et il leur dit cette parabole :
« Il y avait un homme riche,
dont le domaine avait bien rapporté.
Il se demandait :
“Que vais-je faire ?
Car je n’ai pas de place pour mettre ma récolte.”
Puis il se dit :
“Voici ce que je vais faire :
je vais démolir mes greniers,
j’en construirai de plus grands
et j’y mettrai tout mon blé et tous mes biens.
Alors je me dirai à moi-même :
Te voilà donc avec de nombreux biens à ta disposition,
pour de nombreuses années.
Repose-toi, mange, bois, jouis de l’existence.”
Mais Dieu lui dit :
“Tu es fou :
cette nuit même, on va te redemander ta vie.
Et ce que tu auras accumulé,
qui l’aura ?”
Voilà ce qui arrive à celui qui amasse pour lui-même,
au lieu d’être riche en vue de Dieu. »
Faire le plein, remplir ses greniers ! L’avidité est de tous les temps. Il est vrai que notre époque, sur fond de convoitise mais aussi d’angoisse et de perte de sens, dispose tout particulièrement à cette démesure-là. « La vie de quelqu’un, même dans l’abondance, ne dépend pas de ce qu’il possède ». On finit par l’oublier. Alors Jésus nous alerte, avec une grande sagesse. On aurait aimé entendre aussi son intonation, son émotion, lui qui ne cherche pas d’abord à nous corriger moralement de nos inconduites ni à rectifier nos écarts. Éperdu qu’il est de nous, il cherche surtout à nous épargner les mauvais choix et à nous sauver de tout ce qui nous abîme et nous détruit. Il se désole de notre folie à entasser toujours plus et sa parabole est éloquente : il est en effet bien avancé, ce malheureux riche, plein aux as, au moment où il faut quitter ce monde ! Mais quelle délicatesse dans cette curieuse formule : on va te redemander ta vie. On, pas Dieu. Car ce n’est jamais Dieu lui-même qui envoie la mort, comme une échéance en forme de sanction ou de châtiment. La mort, il la connait bien, il sait qu’elle viendra immanquablement pour chacun de nous, comme inhérente à notre condition, et il est le premier à ne pas s’y résoudre. Il veille donc sur ce moment décisif où l’ultime réalité va s’imposer à nous : on va nous redemander notre vie. Mais si nous avons su l’alléger de l’inessentiel, et trouver le goût de la donner, qui donc alors pourra nous menacer de nous la prendre ?
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (Lc 12, 13-21)
En ce temps-là,
du milieu de la foule, quelqu’un demanda à Jésus :
« Maître, dis à mon frère
de partager avec moi notre héritage. »
Jésus lui répondit :
« Homme, qui donc m’a établi
pour être votre juge ou l’arbitre de vos partages ? »
Puis, s’adressant à tous :
« Gardez-vous bien de toute avidité,
car la vie de quelqu’un,
même dans l’abondance,
ne dépend pas de ce qu’il possède. »
Et il leur dit cette parabole :
« Il y avait un homme riche,
dont le domaine avait bien rapporté.
Il se demandait :
“Que vais-je faire ?
Car je n’ai pas de place pour mettre ma récolte.”
Puis il se dit :
“Voici ce que je vais faire :
je vais démolir mes greniers,
j’en construirai de plus grands
et j’y mettrai tout mon blé et tous mes biens.
Alors je me dirai à moi-même :
Te voilà donc avec de nombreux biens à ta disposition,
pour de nombreuses années.
Repose-toi, mange, bois, jouis de l’existence.”
Mais Dieu lui dit :
“Tu es fou :
cette nuit même, on va te redemander ta vie.
Et ce que tu auras accumulé,
qui l’aura ?”
Voilà ce qui arrive à celui qui amasse pour lui-même,
au lieu d’être riche en vue de Dieu. »
Quand on va te redemander ta vie
Faire le plein, remplir ses greniers ! L’avidité est de tous les temps. Il est vrai que notre époque, sur fond de convoitise mais aussi d’angoisse et de perte de sens, dispose tout particulièrement à cette démesure-là. « La vie de quelqu’un, même dans l’abondance, ne dépend pas de ce qu’il possède ». On finit par l’oublier. Alors Jésus nous alerte, avec une grande sagesse. On aurait aimé entendre aussi son intonation, son émotion, lui qui ne cherche pas d’abord à nous corriger moralement de nos inconduites ni à rectifier nos écarts. Éperdu qu’il est de nous, il cherche surtout à nous épargner les mauvais choix et à nous sauver de tout ce qui nous abîme et nous détruit. Il se désole de notre folie à entasser toujours plus et sa parabole est éloquente : il est en effet bien avancé, ce malheureux riche, plein aux as, au moment où il faut quitter ce monde ! Mais quelle délicatesse dans cette curieuse formule : on va te redemander ta vie. On, pas Dieu. Car ce n’est jamais Dieu lui-même qui envoie la mort, comme une échéance en forme de sanction ou de châtiment. La mort, il la connait bien, il sait qu’elle viendra immanquablement pour chacun de nous, comme inhérente à notre condition, et il est le premier à ne pas s’y résoudre. Il veille donc sur ce moment décisif où l’ultime réalité va s’imposer à nous : on va nous redemander notre vie. Mais si nous avons su l’alléger de l’inessentiel, et trouver le goût de la donner, qui donc alors pourra nous menacer de nous la prendre ?
Diacre Patrick LAUDET