Lazare, la vie, la mort – père Michel Quesnel

En 1985, le romancier Alain Absire publiait Lazare ou le grand sommeil, un livre dans lequel il essaie d’imaginer ce que fut la seconde vie terrestre de Lazare, ressuscité par Jésus après sa première mort. Dans l’évangile selon saint Jean, le frère de Marthe et de Marie, ses deux sœurs vivant à Béthanie, ne prend jamais la parole. On ne sait comment il éprouva l’obligation qui lui fut faite d’avoir à mener une seconde vie terrestre alors que, pendant les quatre jours de son « grand sommeil », il avait connu tout autre chose.

Alain Absire invente un contenu à la seconde vie terrestre de Lazare. C’est loin d’être une partie de plaisir. L’homme n’appartient plus vraiment au monde dans lequel il vit. Si Jésus a rendu un frère à Marthe et à Marie, il n’a pas fait de cadeau à celui qu’il a fait sortir de la tombe. Le romancier le décrit présent au Golgotha, informé du Tombeau ouvert et vide, désireux de rencontrer les témoins de la résurrection de Jésus, errant entre la Galilée et Jérusalem, cherchant constamment à mourir et, finalement, au bout de plusieurs années, offrant sa poitrine à un détachement romain qui le menace, lances tendues vers l’avant.

Ce beau roman nous touche, alors que nous vivons dans un pays qui s’apprête à programmer le meurtre. S’il a aboli la peine de mort en 1981, il se prépare à légaliser le suicide assisté pour les personnes en fin de vie ; et il s’interroge sur l’éventualité d’inscrire dans la constitution le droit à l’avortement. Si ce dernier est peut-être tolérable dans des situations dramatiques prévues par la loi Veil votée en 1975, inscrire le droit de tuer dans la constitution d’un pays prétendu civilisé tient plus d’un retour à la barbarie que d’un progrès civilisationnel.

Les existences des Françaises et des Français ressembleraient alors à la seconde vie du Lazare d’Alain Absire, arrachées à une première mort, dans l’attente de tomber dans un éventuel suicide. Quel goût auraient-elles ?

La résurrection de Lazare telle qu’elle est rapportée dans l’évangile selon saint Jean a une autre saveur. La tradition veut que le frère de Marthe et Marie soit venu en Provence avec ses deux sœurs et y ait implanté la foi chrétienne. Vraie ou fausse, sachons tirer parti de cette belle aventure, et osons militer pour que, dans notre pays et ailleurs, le service de la vie prime sur les forces de destruction et de mort.

P. Michel Quesnel, prêtre auxiliaire à Saint-Bonaventure et à la chapelle de l’Hôtel-Dieu

Liubomyr PETSIUKH

Responsable communication

Laisser un commentaire